Le domaine est sensible. Et l’objet de maints
débats et discussions. A l’Assemblée Nationale, à table, entre amis, entre
adversaires, dans les bars, en famille. Et tous y participent. D’abord parce
que tous l’ont connu ou le connaissent encore, comme élève, ancien élève,
parent, professeur, employeur ou salarié. L’objet du débat : notre éducation scolaire forme-t-elle
correctement nos enfants ? Perfidement, j’ajouterai : mais notre
éducation scolaire a-t-elle déjà formé correctement ?
Fort de mes expériences (j’ai quitté le système
scolaire à 21 ans) de cancre (j’ai redoublé deux fois mais je n’ai jamais su si
c’était parce que j’aimais trop l’école ou parce que l’école m’aimait de trop)
ou de premier de la classe, rarement en milieu de classement, de chômeur (3,5
ans sur toute ma carrière professionnelle), de salarié (plus de 14 ans, en
secteur privé comme en secteur public), sous contrat précaire ou sous contrat à
durée indéterminée, d’élu du personnel (6 ans), d’élu de la République, de
magistrat (10 ans conseiller prud’homal) et d’employeur (plus de 8 ans), et
riche d’échanges, de lectures et de réflexions, je pense pouvoir émettre un
souhait sur un nouveau système scolaire pour celui que la plupart des experts
mondiaux jugent en perte de vitesse (cf. site Eurydice) et perfectible. Un
système que je constate, comme professionnel de l’emploi depuis plus de 20 ans,
de moins en moins adéquat pour former nos jeunes à leur épanouissement, tant
professionnel que personnel. A qui la faute ? Aux parents ? Oui. Aux
enseignants ? Oui. Au système ? Oui. Aux enfants (et
adolescents) ? Oui. En fait, à tout le monde… Mais peu importe le ou les
coupables, ce qui m’importe, c’est comment y remédier. Alors j’ai fait un rêve…
J’ai
fait le rêve d’être Ministre de l’Education.
Et
si j’étais Ministre de l’Education, je prendrai les mesures suivantes.
1)
La fin de “l’école pour tous”.
Entendons-nous bien : je ne refuse pas
l’école pour tous mais je refuse la MÊME école pour tous. En clair : comme
nous ne sommes pas physiquement égaux (il y a des petits, des grands, des
maigres, des gros, des faibles, des forts, …), comment voudriez-vous que nous
soyons tous égaux devant l’éducation ? Certains ont besoin de temps pour
apprendre, d’autres apprennent du premier coup, sans beaucoup se concentrer,
sans beaucoup travailler, voire en ne travaillant pas du tout. Ainsi, chaque
année, selon une mesure sur laquelle je reviendrai, je classerai pour l’année
suivante les enfants et adolescents en 3 catégories.
La première regrouperait les élèves ayant le plus
de facilités. Chaque classe pourrait compter entre 25 et 35 élèves et pourrait
recevoir un enseignement de professeurs pédagogiquement moins expérimentés.
La seconde regrouperait les élèves aux capacités
moyennes, normales. Chaque classe compterait entre 15 et 25 élèves.
La troisième regrouperait les élèves ayant le plus
de difficultés. Chaque classe compterait moins de 15 élèves et recevrait un
enseignement délivré par des enseignants pédagogiquement plus expérimentés.
2)
La fin des notes.
Noter les élèves m’a toujours paru stupide. Qui
plus est : humiliant quand on a une mauvaise note. Puis, entre un 6 et un
8 ou un 12 et un 14, surtout dans des matières comme le français, la frontière
est ténue. Subjective. Pour un même devoir, certains professeurs pourraient
accorder un 11 ou un 12 pendant que d’autres ne consentiraient qu’à attribuer
qu’un 8.
En outre, en entreprise, sur le lieu de travail,
je ne connais aucun employeur qui note ses salariés. Soit le travail est fait,
soit il est en cours de réalisation, soit il n’est pas fait. En outre, soit il
est fait, donc bien fait, soit il est mal fait et donc à refaire.
Pour ma part, en milieu scolaire, il devrait en
être de même : soit le savoir est
acquis, connu et maîtrisé, soit il est en cours d’acquisition, soit il n’est
pas acquis, en connaissance ou en maîtrise. Il n’y a plus de classement,
plus d’humiliation, plus de crise d’orgueil. Il n’y a plus que des savoirs
acquis (vert), en cours d’acquisition (orange) ou non acquis (rouge).
3)
La fin des redoublements.
Dans mon rêve, en juin, des professeurs différents
de ceux que chaque élève connaît dans son année scolaire contrôlent son savoir,
sur le mode préalablement défini. Les savoirs sont acquis, en cours d’acquisition
ou non acquis. Et c’est fonction de ces résultats que l’élève sera placé
l’année suivante dans une classe A, B ou C. A de rares, très rares, exceptions,
il n’y aurait plus de redoublement.
4)
Un recentrage de l’école primaire.
Ministre de l’Education, je réformerai les rythmes scolaires de l’école
primaire comme il suit : 4 heures de cours, uniquement le matin, de 9h à
13h, avec deux récréations d’1/4 d’heure, histoire de maintenir la
concentration. Et je recentrerai les programmes du matin sur les savoirs de base que sont : lire,
écrire et compter. Aucun enfant entrant au collège ne devrait y entrer sans
les connaître et les maîtriser. Et avec mon idée préalablement définie (un
contrôle tous les ans), ce serait impossible. Ou extrêmement marginal.
Chaque après-midi, après le déjeuner et un temps
de repos, serait consacré à l’apprentissage de savoirs sur un mode
ludique : la chronologie de notre histoire, la morale républicaine et
l’apprentissage de la langue anglaise en tête, les arts, les sports (notamment
apprendre à nager) et l’écologie ensuite.
5)
Un collège en deux parties.
La sixième et la cinquième seraient la poursuite de
l’école primaire, approfondissant la maitrise des savoirs de base, faisant
évoluer la chronologie historique vers l’histoire, introduisant la géographie,
abordant les sciences physiques, chimiques et biologiques, surtout sous l’angle
de la préservation de l’environnement, les arts, l’éducation manuelle et
technique.
La quatrième et la troisième, seconde partie du
collège, verrait une nouveauté, un retour aux sources : le retour de l’apprentissage dès la quatrième. Mais pas
par dépit : par choix de l’élève, avec avis des parents et du corps
professoral. Seule l’union de ces deux parties pourrait aller contre le désir,
la volonté de l’élève. En circuit général, la quatrième et la troisième
seraient pédagogiquement la poursuite de la sixième et de la cinquième, évidemment.
6)
Un lycée de plus en plus spécialisé sur
une famille professionnelle, un métier.
J’ai toujours été frappé par la distinction que
l’on fait entre métiers “intellectuels” et métiers “manuels”. Pour moi,
certains métiers demandent plus de connaissances livresques que d’autres.
Certains s’apprennent par la lecture, l’écriture ou l’élocution du professeur,
d’autres par la démonstration et l’exécution. Par exemple, raboter une planche
peut s’expliquer par la lecture ou l’enseignement oral mais il lui faudra la
démonstration de l’enseignant menuisier et surtout l’expérience. Il faudra
longtemps raboter sous les yeux d’un professeur de menuiserie et avec ses
conseils avant d’être un bon raboteur. Mais c’est le livre et l’enseignement
“intellectuel” qui permettront à l’élève de construire un meuble plus vite que
par l’expérience, si tant est qu’elle y suffise. Et devenir ainsi un
menuisier-ébéniste, non un simple ouvrier raboteur. Le premier saura mener à
bien plusieurs savoirs pour aller jusqu’au produit fini, le second restera un
exécutant, dépendant le plus souvent du premier. Et il en est de même pour tous
les métiers.
Le lycée, pour moi, ne doit être que la
préparation à l’emploi et à l’épanouissement professionnel, que la fin des
études soit programmée par les élèves et pour eux-mêmes, avec accord du corps
professoral, des parents et des professionnels, que cette fin des études soit
au baccalauréat ou beaucoup plus tard.
7)
Un lycée beaucoup plus ouverts sur
l’emploi.
Depuis que je suis dans la vie active, j’ai
toujours été frappé par ce constat de deux mondes qui disent se connaître mais
qui s’ignorent : l’entreprise, ou sens employeur (j’y mets donc aussi l’Administration),
et l’Education Nationale. La plupart des élèves, rapidement, constatent cette
dichotomie. Et la plupart d’entre eux n’y trouvent pas de solution. Juste un
emplâtre. Et encore. C’est, pour moi, l’une des explications du départ du
système scolaire chaque année de jeunes sans diplôme, sans même le niveau. De
trop nombreux jeunes.
Ce que je propose, c’est de faire entrer le monde de l’emploi dès le lycée et de lui donner du
pouvoir. Sur les créations de formation, leur nombre, le nombre d’élèves,
les programmes de formation, les diplômes. Pour certains, c’est donner trop de
pouvoir aux employeurs. Mais, pour moi, c’est permettre aux jeunes de
s’intégrer, de se réaliser. Connaître le grec ancien, c’est bien, mais savoir
gagner son moyen de vivre (manger, se loger), c’est primordial. Et, une fois
encore, les deux savoirs ne s’opposent pas : ils se complètent.
8)
La formation des maîtres et professeurs.
Quand j’étais plus jeune, entre 18 et 20 ans, l’une
de mes amies se préparait à devenir institutrice. Elle avait juste le
baccalauréat. Mais je me souviens de son amour des enfants et de
l’enseignement. Quelques temps après, pour devenir instituteur, il a fallu
avoir bac+2, puis +4.
Pour ma part, pour les instituteurs (je préfère
cette appellation, plus noble que cette hypocrisie qu’est le “professeur des
écoles”), je reviendrai à ce niveau, avec examen à l’entrée des écoles des
maîtres (une fois encore, je me passe de la nouvelle appellation barbare qui a
suivi, l’I.U.F.M., elle-même remplacée depuis) pour valider les connaissances
nécessaires à l’enseignement et valider le désir des candidats pour enseigner.
Cette formation serait menée en deux ans, la
première étant consacrée à l’étude des programmes et des méthodes pédagogiques,
la seconde serait tournée vers une formation encadrée par un tuteur.
Ce n’était qu’un rêve, quelques idées qui méritent
d’être approfondies. Mais ce qui est certain, c’est que notre système scolaire
ne peut demeurer en l’état, soit peiner à conserver ses enseignants, peinant à
attirer des candidats, laissant sortir nombre d’élèves sans diplômes, surtout
sans diplôme monnayable (je n’ai rien contre le baccalauréat littéraire mais
quiconque s’arrête à ce niveau n’a pas d’emploi, du moins pas plus que celui
qui n’aurait rien), voire, pour certains, sans maîtriser les savoirs de base. A
ce stade, ce n’est même plus un changement que j’attends : c’est une
révolution. Et pas onirique.
j'ai également fait un rêve "have the dreams" devenir ministre du bon sens....! JFF pour stéphane
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