À l’aube de chaque élection
présidentielle, les élus en panne d’inspiration politique, en panne d’ambition,
en panne de projet d’avenir en parlent comme d’un serpent de mer : nous
allons réformer
notre fiscalité. Sauf qu’en guise de réforme, ils se contentent de vouloir nous rendre l’impôt indolore en le
prélevant à la source. Avec deux intérêts pour l’Etat, sûrement pas pour le
contribuable : au lieu de laisser la liberté de payer, donc d’orienter le
choix politique, à plus de 20 millions de contribuables, qu’il faut contrôler,
quelquefois mettre en recouvrement (en clair ; envoyer l’huissier, voire
la police), ils vont le faire au travers des 36 000 patrons français qui
n’ont pas demandé à devenir agents du fisc et qui ne seront même pas rémunérés
pour cela, voire qui risquent même d’avoir des amendes (exemple existant
déjà : les saisies-arrêts sur salaire). Second intérêt : diminuer, à
terme, la masse salariale des services fiscaux. J’en vois encore un troisième
mais l’on va me taxer de mauvaise fois : si un patron en difficulté ne
reverse pas ce qu’il a prélevé, la C.G.T. pourra encore crier à l’hallali sur
le patronat et arracher la chemise de chacun de ses membres. Sauf que si ce
dernier syndicat s’informe quelque peu sur la DSN (Déclaration Sociale
Nominative), promise à être mensuelle pour toutes les entreprises, qui l’est
déjà pour les plus importantes, le “vol” n’ira pas plus loin qu’un mois... Ou
alors, c’est que l’Etat ne fait pas son travail et là est un autre problème...
Vous l’avez compris : je suis CONTRE le
prélèvement à la source.
Pourquoi ? Parce que comme patron, je n’ai pas à connaître la situation
personnelle de mes salariés (j’en sais déjà beaucoup trop), je n’ai
pas à connaître non plus leur patrimoine, immobilier ou financier, les
personnes qu’ils ont en charge, leurs éventuelles investissements sociaux,
associatifs ou caritatifs et autres. Michel SAPIN, Christian ECKERT et leurs
sbires ont beau garantir l’anonymat, les différents taux applicables
transpireront forcément des renseignements, à tout le moins des idées, vraies
ou fausses. Il devrait bien exister un taux standard mais ce sera pire, un peu
comme il existe pour chaque entreprise la possibilité de ne pas divulguer ses
chiffres moyennant le paiement d’une amende au Tribunal de Commerce dont elle
dépend. Sauf que le remède est pire que le mal : si une entreprise ne
publie pas ses chiffres, c’est qu’elle a quelque chose à cacher. Soit elle
gagne “trop” d’argent et elle ne veut pas que cela se sache, soit elle n’en
gagne pas assez, voire elle en perd et elle ne veut pas non plus que cela se
sache ! Sans compter d’autres informations.
Pourquoi ? Parce qu’en termes de pédagogie, ce sera déplorable.
J’en veux pour preuve les cotisations sociales, payées en majorité par
l’employeur (un taux de 45,804 % concernant mon entreprise) et en minorité par
le salarié (un taux de 22,462 % concernant mes salariés). Aujourd’hui, entre le
salaire net et le salaire chargé, le coefficient approche les 1,7 ! Et je
ne compte pas les congés et absences légales, rémunérées et chargées. Ces
cotisations ont un objectif : payer nos prestations sociales (retraites,
assurances maladies, allocations familiales, ...) mais peu s’en souviennent. La
majorité de nos concitoyens “oublie” que ces services ne sont pas gratuits.
Quelque part, j’aimerais que chacun perçoive son salaire entier et paie ensuite
sa retraite, son assurance maladie, son assurance invalidité, l’ensemble de nos
prestations sociales. Je suis certain que la majorité ne le ferait pas, du
moins en intégralité (je me souviens trop de l’un de mes salariés, il y a
quelques années, qui refusait que je lui prélève la cotisation de l’URSSAF pour
la maladie et la maternité sous prétexte que, n’étant pas une femme, il ne
serait jamais enceinte ! Cela peut prêter à sourire sauf qu’il était très
sérieux dans sa demande).
Alors que faire ?
À mon humble avis (qui en vaut un
autre mais que je défends), je ne vois qu’une seule solution qui assurera
l’anonymat et qui facilitera tout le monde, sauf le fraudeur : augmenter la CSG,
qui taxerait les salaires, les pensions, les dividendes, les intérêts, tous les
gains d’argent MAIS (j’en connais déjà qui bondissaient de leur chaise avant
d’avoir lu ce “MAIS”) qui s’accompagnerait d’une réversion mensuelle d’une
partie, voire de tout, voire plus encore mais aussi, peut-être, de rien, d’une
somme d’argent à chacun en fonction de sa situation personnelle. Cette solution
aurait l’avantage de conserver l’anonymat de chaque salarié vis-à-vis de son
employeur mais aussi de faciliter la collecte de l’impôt par son prélèvement à
la source et des déclarations de plus en plus pertinentes parce qu’intéressées
de chaque contribuable. Bien entendu, cela devrait s’accompagner d’une centralisation
des organismes de versement de l’Etat, peut-être d’une obligation d’assurance
ou de caution pour chaque entreprise.
À creuser.